Crime contre l’humanité ou transition démographique accélérée ?

La question reste d’actualité : l’élimination systématique et d’ampleur inégalée des femmes dans certains pays d’Asie est-elle un crime contre l’humanité ou ………..

« le symptôme d’une phase d’adaptation dans le processus de transition vers un régime de basse fécondité » (doc. p.56) ?

Isabelle Attané Naître femme en Chine, une perspective démographique

Langues de bois et crocs acérés.

En France, les euphémismes scientistes – servis par l' »objectivité » des démographes – assoient la version officielle :

> « déséquilibre du sex ratio » …. le déséquilibre est une conséquence ! La cause est une élimination systémique d’un groupe humain.

> Selon les « lois de la nature » les garçons seraient plus nombreux à naître de par le monde. « Le sex-ratio naturel à la naissance, c’est à dire en l’absence de discrimination, serait de 105 garçons pour 100 filles« . Je demande instamment aux scientifiques de me fournir leur liste de pays ou de groupes humains où ils ont pêché la population témoin qui leur a permis d’évaluer le sex-ratio naturel ! Où il n’y a pas de « discrimination » sexiste ? Ne cherchez pas du côté de la France, l’élimination existe, dès bébé [on lira Brian & Jaisson, Le sexisme de la première heure, 2010], en couple [le chiffre de 1 femme tous les 2 jours et demi est ridiculement bas, cela ne prend en compte aucune des conséquences de la violence conjugale : maladies cardio-vasculaires, maladies auto-immunes, suicide, alcoolisme, blessures à la vieillesse qui mènent plus rapidement à la mort], dans la prostitution [les chiffres n’existent même pas, on pourra à peine se recueillir devant un in memoriam virtuel établi par Prostitution et Société] . Il faut en finir avec les vieilles lunes patriarcales créées pour nous faire croire qu’il existerait des « démocraties égalitaires » voire des « matriarcats », bref que les hommes n’auraient pas pris le contrôle de nos vies jusqu’à la mort, partout, depuis des siècles. Je vous conseille Nicole Claude Mathieu, Une maison sans fille est une maison morte, 2007.

> femmes « disparues« . Ce mot n’est utilisé que par les autorités qui masquent leurs crimes. Les disparitions politiques ont divers noms (enlèvement, assassinat, élimination, etc.), mais certainement pas cet euphémisme.

> femmes « manquantes » …. manquantes à quoi ? Ce mot aberrant vient de la manière dont sont réalisés les calculs : les démographes comptent les hommes, et en déduisent le nombre de femmes « disparues » ou « manquantes » de n’être pas nées des femmes mortes. Elles sont « manquantes » à quoi ? au coït hétérosexuel et à la reproduction … Nos mortes sont dénombrées par leur manquement à l’usage dominant : la complémentarité des sexes et la reproduction !

Mais elles ne manquent pas aux autorités éthiques ni humanitaires, telles que les TPI ou Amnesty International. Preuve en est, les seuls papiers alarmistes dont se foule le patriarcat mondial (en France comme dans les pays génocidaires d’Asie) concernent principalement …. les hommes ! Les hommes qui ne trouvent pas à se marier (détail de l’histoire : ils sont fournis par des réseaux de rapts de femmes…. vieille technique patriarcale déjà utilisée pour la fondation de Rome), ceux qui trouvent pas de femme à baiser (ils sont fournis par des réseaux proxénètes …. vieille technique patriarcale, fleuron de la culture Grecque), ceux qui commenceraient à s’écharper entre eux, faute de défouloir féminin (ah … que d’Hélène de Troie sont accusées pour teinter de bravoure ou d’innocence les massacres mystifiés par la réquisition virile de l’Histoire !).

> « foeticide » ou « infanticide » … non, non, ces humains ne sont pas tuées en raison de leur statut de foetus ni de mineure !

> Isabelle Attané invente une expression : « ingénierie démographique, c’est-à-dire la manipulation volontaire des lois de la nature afin d’arriver à des fins familiales ou sociétales ». Le patriarcat n’est que cela : une manipulation volontaire de la reproduction et de la sexualité à des fins d’arriver à une domination familiale, conjugale et sociétale [cf. Paola Tabet, La construction sociale de l’inégalité des sexes, 1998 – extrait]. Ceci n’est pas un phénomène démographique (nécessaire) ni machinique (post-industriel) ! Ceci est une violence délibérée, intentionnelle, organisée dans les patriarcats même les moins complexes. Cela a un nom : OPPRESSION. Et l’élimination physique et sociale qui l’organisent a un nom aussi, que certaines Conventions Internationales ont écrit dans le marbre au lendemain du génocide nazi.

> « Transition démographique » ? une hypothèse parmi d’autre, parfois centrale … mais totalement absurde. Je cite le dossier d’Amnesty International [mars 2007, cité plus bas, p.12] : « Pendant la première phase de la transition démographique, le taux de mortalité chute fortement (progrès sanitaire, alimentaire, industrialisation dans le cas des pays riches…) tandis que la natalité reste forte voire augmente. L’accroissement naturel est donc fort, ce qui signifie une croissance rapide de la population. Dans la deuxième phase, la mortalité continue à baisser mais plus lentement et la natalité se met elle aussi à décroître. Le maximum de l’accroissement naturel est atteint au début de cette deuxième phase. Puis la natalité baisse plus fortement et on a donc une décélération du rythme d’accroissement de la population. »

En insérant cette définition dans son dossier consacré à « Une situation démographique alarmante« , Amnesty International veut nous rassurer ? … « Patientez Mesdames, la reprise est proche, ce n’est qu’une phase de rigueur, dans les deux sens du terme… » . A.I. semble flotter dans ses explications quand son jugement éthique est altéré. Peut-être faut-il rappeler les caractéristiques de la courbe sexiste propre à cette « transition démographique » alarmante … Première phase : élimination sociale (abandon sanitaire, restrictions alimentaires, gap technologique et maintient de l’esclavage domestique dans toutes les phases d’évolution de l’organisation économique, etc.) et fort taux de mortalité, tandis que la fertilité est imposée [cf. Paola Tabet, 1998]. Deuxième phase, la mortalité continue à augmenter, mais brutalement, et la viabilité des petites filles se met à décroître, elle aussi, brutalement. Puis leur viabilité baisse plus fortement encore et on a donc une décélération du rythme d’accroissement de la population féminine, en bref, une accélération de son élimination.

En résumé. La transition démographique a un moteur : la chute de la mortalité. Une conséquence : l’accroissement de la population et l’arrangement de ses conditions de vie. Parler de « transition démographique » pour analyser la situation des femmes en Asie est donc une sinistre blague. Sauf à prendre le point de vue viril pour objectivité, comme d’habitude. Car c’est seulement de ce point de vue que la population croît (de manière relative et absolue tant que les survivantes seront recyclées dans la production d’hommes et dans leur entretien matériel), leur natalité baisse et peu baisser encore si le sex-ratio atteint un seuil critique. Et en effet, à moyen terme et à long terme, les conditions de vie des hommes, comme caste mondialisée, s’en trouvent améliorées, car le patriarcat se renforce de ses crises … un exemple : ça fait 30 ans que les survivantes Asiatiques sont déportées par dizaines de millions vers les bordels et vers les plateaux de tournage porno du monde entier. Toutes les guerres viriles organisent le réconfort des guerriers, même ceux d’arrière-arrière-ligne.

> La palme négationniste revient donc à l’expression ……. « transition démographique accélérée » – que n’a pas osé formuler en entier Amnesty International. …poûmpoûmpoupoûm … comment dire, hêuuuu ? décélération un peu trop rapide du rythme d’accroissement de la population, décrochage des femmes au démarrage, c’est regrettable, mais tellement nécessaire en raison de la démographie inquiétante de certains pays … [c’est une thèse banale, que l’on trouve par ex. chez Michel Bozon, dans « Sociologie de la sexualité »].

=

Pur négationnisme ! Déqualification des faits !

Or la réalité est politique et pénale :

Crime contre l’humanité

Génocide

Persécutions organisées, dont la prostitution en masse des survivantes !

Y a basta des perspectives démographiques qui font croire que l’élimination ciblée du plus grand groupe humain n’a rien d’une urgence éthique ni politique !

Nausée éthique.

J’ai une nausée sans nom devant le cynisme des articles qui sont sortis au compte goutte sur notre génocide. Je frémis encore du choc qui m’avait saisie à la lecture d’un numéro consacré au « déséquilibre du sexe ratio » par Courrier International [mars 2006].

Ces articles était un ramassis de violences sexistes : plainte masculiniste des hommes privés de certains droits (cuissage et propriété) + accusation des mères + explication du génocide par … les arguments mêmes des génocidaires !! Il compilait tous les argument négationnistes et haineux que l’on entend dans tous les médias, français et internationaux.

– Si le thème est la catastrophe, elle est …. toujours à venir !

La seule catastrophe dont parlent médias et universitaires est démographique. S’alarmer, comme Amnesty International, d’une « situation démographique », d’un « déséquilibre du sex ratio » ne signifie qu’une chose : on s’alarme que les femmes ne pourront pas reproduire « la prochaine génération »! Thème récurrent, qui avoue brutalement que l’élimination des femmes n’est pas en soi une catastrophe. Et si malgré des dizaines de millions de mortes, il n’y a pas mort d’homme, pour qui s’inquiète-t-on dans la « prochaine génération » ? pour les garçons.

Un article plus récent a le mérite d’être encore plus cynique : AgoraVox se demande si « la guerre des sexes n’aura pas lieu » dès lors qu’un seuil critique de « déséquilibre de sex ratio » sera atteint … oui, oui, le journaliste se demande si la guerre aura lieu, au futur, comme si l’élimination de plusieurs dizaines de millions de personnes n’indiquait pas que, déjà, la guerre était déclarée et, déjà, perdue par les femmes ! La photo qui illustre l’article est proprement indignante : des femmes en treilli militaires et une femme qui jette un regard volontaire à la caméra. Ce choix éditorial signifie une chose : la peur exprimée dans le titre de l’article ne se préoccupe pas des femmes parce qu’elles sont effacées de la surface de la terre. Non….. le journaliste a peur pour les hommes ! lui et ses congénères pourraient voir apparaître une armée de femmes, prête à déclarer la mythique « guerre des sexes » ! oui, oui, celle que les virilistes nous promettent dès que nous esquissons le geste de nous protéger … Que ces messieurs se rassurent, mortes nous ne pouvons vraiment plus les tuer, ni même nous portéger … d’autant plus que vivantes, déjà, nous en sommes lourdement empêchées : ils nous désarment, nous réduisent à l’impuissance physique et mentale, et nous affament. Cette peur, argument central, contraste avec le ton global de l’article, à savoir, la neutralisation éthique. Le journaliste noie tout choc éthique en avançant toutes sortes de causes farfelues, par lesquelles il met hommes et femmes dans un même statut de victimes (en invoquant une pollution écologique) et dans un même statut d’accusés d’une autre catastrophe à venir (en prédisant une vague d’avortements consuméristes). Par ce dernier argument, il explique les pratiques d’élimination par la psychologie : la « préférence pour un sexe ». Ce trait « psychologique » ne lui fait pas froid dans le dos ? il lui semble naturel ? …. c’est vrai qu’il est banal, en France, de se réjouir de la venue d’un enfant en demandant son sexe … Et que cette « préfence » puisse être un goût partagé par des « consommateurs » occidentaux ne semble aucunement le mener à penser qu’il existerait des relans génocidaire dasn ces pays. De fait, la « préférence pour les garçons » qui sévit en Asie lui est totalement compréhensible, au sens fort, au sens d’admettre la légitimité qu’auraient certains à préférer les garçons.

Autre thème qui tire des larmes ou des frémissements aux journalistes : la catastrophe sociale à venir. Les hommes, en l’absence de femmes, pourraient devenir plus agressifs !! Vous vous demandiez ce que peut être une agressivité plus grande que celle qui consiste à éliminer 100 millions de femmes ? Et bien ne vous demandez plus : c’est déclarer une guerre … à des hommes ! Le cynisme confine à l’abjection.

Dans un numéro des « Dossiers de la commission enfants » d’Amnesty International, mars 2007 (en ligne), je retrouve les mêmes jérémiades masculinistes. Je cite : « D’après l’étude de Hudson et Den Boer sur les conséquences stratégiques à l’échelle internationale de ces déséquilibres, ce surplus de jeunes hommes pourrait menacer la stabilité de certains régimes. Cette « force volatile » trouverait « dans des options militaires ou sectaires agressives, un exutoire aux tensions sociales d’une société à prépondérance masculine « . « les conséquences du déficit féminin actuel sur le « marché matrimonial » sont inévitables. Ainsi parmi les jeunes hommes nés depuis vingt ans, une grande quantité d’entre eux ne trouveront pas d’épouse. L’excédent masculin en Chine pourrait atteindre 20 % vers 2030, soit 1,6 millions d’hommes qui ne trouveront pas de femmes« .

– Quelles causes à la catastrophe à venir ? ben les femmes !

Comme il faut s’y attendre, les papiers patriarcaux (articles, rapports) accusent les femmes de leur propre génocide. Ils insistent sur l’avortement, sur les actes des mères. Parfois, pour consolider le mensonge, ils expliquent : « L’enquête a également démontré que, « plus le bagage intellectuel de la mère est élevé, plus le sex-ratio est défavorable aux filles ». » [Courrier International, mars 2006].

Le dessin en page 8 du dossier d’Amnesty International [cité plus haut] est exemplaire de la propagande qui accable les femmes pour innocenter les hommes : une poule, l’air fâché, qui casse les oeufs marqués d’un signe féminin et, en page 9, qui couve, l’air satisfait, des oeufs masculins. Ces dessins illustrent la partie « négligence » qui serait une des méthodes principales d’élimination des filles. Aucun autre dessin, dans tout le document, ne figure ces deux intentions coupables, indiscutablement condamnées en cas de crime : intention meurtrière et absence de remords, mieux : satisfaction ! Seulement en page 13, un bébé est menacé par des pics tenus par être courroucé : un arbre ; mais ce n’est un symbole ni de l’homme ni du père alors que la poule figure la femme et la mère. Les rares hommes représentés, page 11, apparaissent comme des êtres sans yeux ni bouche, passifs, ou des symboles, en page 4. Ou bien, ils sont fondus, dégenrés, dans leur masse, au côté de quelques survivantes, en page 3. Les élus, ceux qui ne risquent ni le massacre ni la traite ni le rapt, ne sont que des témoins muets de la catastrophe ? Loin d’organiser et de bénéficier d’un génocide, ils semblent côtoyer, étonnés ou naïfs, des femmes barrées, rayées ou disparues sans que l’on sache pourquoi.

– Ah ces avorteuses … c’est encore une affaire de femmes !

Les discours savants et médiatiques n’ont pas seulement pour but de couvrir un génocide lointain. Ils sont aussi un agenda sexiste dans les pays où ils sont diffusés. Ce n’est pas un hasard s’ils donnent à l’avortement une place centrale dans la catastrophe actuelle. D’abord pour faire porter aux femmes la culpabilité de ce massacre. Puis pour individualiser les pratiques génocidaires. Ainsi, faire accroire que ce n’est pas un plan organisé (patriarcat), dans lequel les hommes ont statut de bénéficiaire. Enfin, ils attaquent directement le droit à l’avortement des femmes. L’article d’AgoraVox là dessus est clair, le journaliste agite l’épouvantail consumériste en disant que c’est la dérive probable des pratiques d’avortement dans les pays Occidentaux. Purs mensonges. D’une part, les révisionnistes font mine de confondre le moyen, la technologie, et la cause du massacre. Sans avortement, pas de massacre, semblent-ils dire. Faux. Les génocides de femmes sont aussi vieux que le patriarcat (Rome a été fondé dessus, même Darwin souligne ces pratiques en Angleterre à la fin de son livre La Filiation de l’homme et la sélection liée au sexe). D’autre part, en focalisant sur les avortements tout en parlant de crime, ils déplacent sur l’avortement l’acte criminel. Ils mystifient les faits. Ils disent que ce sont les avortements qui constituent le crime. Alors que c’est l’intention génocidaire qui caractérise les faits. Cette même intention qu’ils nient. D’une pierre deux coups : leur négationnisme sert leur propagande anti-avortement. Je prends un exemple pour faire comprendre la supercherie. Couper des cheveux et les vendre n’a rien de délictuel ni criminel. Nombres de coiffeurs arrondissent leurs fins de mois ainsi. Mais cet acte a pris une toute autre signification dans l’enfer contrationnaire : cela a été une des pires abjections des crimes nazis, car soudain, la déshumanisation prenait toute sa dimension : des humains pouvaient être réduits à des bouts d’eux-mêmes, et qui ne sont plus même des bouts d’humains (comme peuvent l’être les cendres, les reliques ou les ossements) mais des choses à consommer par d’autres. C’est le contexte, l’intention coupable et les conséquences sur la victime qui caractérisent les crimes, pas les gestes en eux-mêmes. Faire écouter de la musique à quelqu’un n’a rien de déliquant, et pourtant, cela peut relever de la torture si l’intention coupable existe et si certains moyens sont mis en oeuvre. De même, l’avortement n’a rien de délictuel ni criminel (en France). Mais pratiqué dans un contexte de persécution ciblée, il a valeur de crime contre l’humanité. Doublement : d’une part, contre les femmes avortées, car il est une autre forme de contrôle total par le pouvoir masculin, de destruction de leur intégrité physique et morale, bref d’appropriation totale par les dominants. D’autre part contre toutes les femmes vivant dans ce pays ou cette région, car c’est elles qui sont visées par l’acte d’élimination, c’est en tant que « femme » que le foetus est traité, et donc tué. Les avortements devraient donc être poursuivis comme part du plan génocidaire. Dès lors, les « avorteurs » à l’intention coupable, les vrais coupables de crime contre l’humanité, apparaîtraient : les hommes, dont le système de domination a mené au massacre. Les victimes seraient aussi enfin reconnues : les femmes avortées et toutes les femmes contemporaines de ces femmes. Toutes les femmes du monde entier, nous toutes sommes désignées et comme « fardeau » indésirable et comme ventre à manipuler selon les intérêts de la caste au pouvoir. Je rappelle que le crime contre l’humanité d’un groupe touche tout le groupe. Et enfin, la communauté humaine est attaquée dans son fondement, à savoir l’humanité de chaque humain sur terre, car elle ne peut qu’être partagée par tous les individus, sans exclusive.

En réduisant les actes criminels aux avortements, et en effaçant totalement l’intention génocidaire, les révisionnistes ne font pas que déqualifier les faits : ils font de l’avortement l’acte criminel. Ils criminalisent l’avortement. Mais aussi ils victimisent le foetus. C’est pour cela qu’ils insistent tant à parler de foeticide. Ils font exister le foetus, lui attribuant un statut pénal et philosophique de victime du massacre. A l’instar du système génocidaire, ils prennent le foetus pour la « femme » que visent le crime. Ils entérinent la marque naturelle [cf. C.Guillaumin système de marques ] créé par les génocidaires pour éliminer les femmes d’une manière encore plus systématique, ils entérinent le mythe sexiste que la caste féminine existe dès le stade foetal, le mensonge que dès le stade de foetus, un humain peut être « une femme ». Le système criminel par ses actes, les commentateurs français par leurs amalgames naturalistes, tous renforcent deux mythes patriarcaux : ils attribuent au foetus un statut de sujet pour criminaliser l’avortement et ils étendent la naturalisation du statut de « femme » à l’état de foetus.

Il faut comprendre la propagande occidentale sur ce génocide en Asie aussi comme un discours sur l’avortement, porté ici, pour faire reculer nos droits. Les patriarcats sont depuis longtemps en phase de mondialisation, et la pression génocidaire à un bout de la planète fait régresser les droits de toutes les femmes : la pression proxénète, gonflée par les guerres impérialistes et ce génocide depuis 30 ans, a déjà écrasé, vias certaines Conventions Internationales et dans les pratiques judiciaires nationales, nos droits fondamentaux quant à l’inviolabilité et l’inaliénabilité de notre corps, l’atteinte à l’intégrité physique et morale … d’autres régressions vont suivre. Le droit à avorter est lui aussi au centre de l’inaliénabilité de notre corps. Il ne peut exister sans notre autonomie, et dès lors que nous restons réquisitionnées pour la reproduction et la pénétration virile, l’instrumentalisation de l’avortement à des fins sexistes sera inévitable.

– Ben, que voulez-vous mon bon monsieur … « une société » « en crise » …

Comme dans toutes les publications sur le sujet, on essaie de nous faire croire deux choses : 1) les hommes n’organisent rien (c’est madame qui avorte et néglige) 2) ils en souffrent aussi (ils ne se marient plus, se font des guerres, sont obligés de se déplacer pour posséder des femmes …). Et la démonstration de l’innocence des hommes est simple : 2) démontre 1)…. pour sûr, ils ne pourraient tout de même pas organiser quelque chose qui leur rend la vie plus difficile …. C’est méconnaître la logique de l’oppression, qui est un système organisant les individus et non la convergence fortuite d’intérêts naturels éclos dans les individus. Le système est au maximum de son efficacité quand les intérêts individuels des dominants sont ajustés à leurs intérêts de classe. Mais les périodes de crise révèlent un fait important : la logique de classe prévaut toujours sur la logique individuelle. Certains agents du système peuvent bien sauter, le système se renforce toujours par ses crises. La logique de classe est renforcée, à savoir le règne sans partage d’une caste sur une autre – quel plus grand règne que la destruction finale ! Les intérêts individuels de la majorité des hommes sont renforcés grâce à la terreur instaurée et grâce aux recours d’urgence : déportations à des fins matrimoniale et prostitutionnelle. Ces phénomènes assurent un règne individuel sans limite sur les femmes terrorisée et/ou déportées. L’élimination ciblée est d’autant plus légitime qu’elle cible des êtres marqués par un double statut de propriété de l’homme, caractérisé par la disponibilité sans limite et souvent par la minorité légale : « femme » + « enfant ». De fait, c’est le double pouvoir patriarcal qui s’en trouve renforcé.

C’est bien parce que ces intérêts dominants sont préservés que les médias ne font que parler d’une catastrophe à venir : celle qui pourrait toucher les hommes (au plan démographique, de leur reproduction de père en fils). Mais il ne faut pas oublier le but de la propagande : agiter de fausses catastrophes pour masquer les véritables ; se faire l’écho du brâme des dominants qui, blessés dans leur certitude de maîtriser jusqu’à la mort, réorganisent leur délire carnassier ; répercuter au centuple cet hallali pour masquer leurs plans et les cris de leurs victimes.

– … « et puis les femmes, quel fardeau » !

Les explications de la « catastrophe » se font tautologiques. Car elles reposent sur le même postulat patriarcal : [fait de naissance =] une femme est un être à traiter différemment d’un homme … l’élimination est donc un avatar du traitement différentiel naturel [= un accident démographique].

L’article d’AgoraVox résume des dizaines de publications sur la question : « Les causes de ce déséquilibre sont d’ordre social. En Inde, [avoir une fille] c’est se condamner à faire des économies et s’endetter parfois une vie durant pour rassembler sa dot, sans rien en retour« . Votre fille est une fille, voilà pourquoi elle est morte ! L’un des titres de chapitre du rapport d’Amnesty International cité plus haut est encore plus lapidaire : « La préférence masculine : les filles sont des fardeaux ». Subalternes = « fardeaux », parasites, entretenu-e-s … voilà la terminologie génocidaire elle-même. Une prise de distance rhétorique aurait été un minimum (guillemets, conditionnel, etc.). Mais totalement incapable de masquer la collusion d’intérêts qui oeuvre en silence dans toutes les publications patriarcales qui reproduisent à l’infini les phrases assassines de leur génocide.

Le fardeau qui leur pèse, aux masculinistes, est un cadavre sans précédent, l’histoire sans fin de leurs crimes contre notre humanité : domestication, viol, viol par inceste, persécution, passage à tabac, prostitution, élimination. Leur monde de guerre et de haine est érigé d’abord contre nous. Le fardeau de leurs bourses pleines : plus de 50% du PIB, voilà le prix de notre servitude domestique en France. Les ségrégations sexistes verticales et horizontales du marché du travail produisent un richesse colossale. Plusieurs centaines de milliards de dollards : voilà le prix de notre esclavage prostitutionnel à échelle mondiale. Sans compter les dividendes de notre putification, ces milliers de milliards « d’images » de nous qui organisent le secteur publicitaire et cinématographique. Leur monde de richesses accaparées repose sur nos épaules et celles des fillettes.

Colère politique.

Accablement assourdissant des mères. Accablement post-mortem des « fardeaux ». Le but de cette propagande est de masquer les vrais coupables, les hommes, ceux qui bénéficient de ce massacre, directement (ils sont épargnés) et indirectement (la déportation à des fins de viol et d’esclavage, et l’appropriation sans limite, sont désormais « rationnellement » justifiés). Qui oseraient dire que les femmes bénéficient de leur propre élimination ? Les hommes en France l’osent, via leur propagande médiatique et savante. Ils démontrent leur complicité de classe. Mais nous, féministes, ne pouvons ignorer ce que signifie tout cela. Nos soeurs d’Asie ont chacune un numéro : beaucoup en sont mortes, les autres doivent encaisser le sexisme exacerbé des bourreaux. Toutes ont pour devoir d’enfanter de nouveaux élus, et éliminer leurs semblables. Celles qui le font doivent se détacher assez d’elles-mêmes, de leur être et de leur coeur, elles doivent se rapprocher assez de leur haine d’elles-mêmes pour ne pas faillir face à leur fille, et tuer celle qu’elles sont, et, par ce meurtre, repousser loin d’elles, celle qu’elles auraient pu être. Enfin, elles doivent porter, jusqu’à leur mort, ces cadavres intimes, les porter dans le gouffre de leur coeur et dans le charnier de l’Histoire. Si certaines ont du sang sur les mains, c’est le leur, c’est le nôtre, pas celui d’un autre. Il y a une différence éthique fondamentale entre le suicide et le meurtre. Nos soeurs là-bas, sont victimes d’un suicide collectif orchestré par et pour les hommes. Les hommes, eux, ont notre sang sur la conscience, trois fois : une fois d’avoir organisé ce déchaînement de haine, une deuxième fois d’avoir imposé à des mortes en sursis d’exécuter leur basse besogne, une troisième fois de durcir la persécution des survivantes. Et bien souvent, ils ont du sang sur les mains, car ils tuent aussi, ça les journalistes le taisent.

Cette propagande baigne donc dans un lourd silence, une conspiration des oreilles bouchées orchestrée par la propagande masculiniste, car les complices des génocidaires locaux règnent partout dans le monde.

Silence sur la violence inouïe des hommes contre ces femmes, contre les filles, en meute et individuellement. Silence non factuel mais silence éthique : les faits de violence sont parfois admis, mais comme une cause parmi d’autres, collés à côté des raisons « rationnelles », ces fameuses considérations sur le caractère inutile et pesant ou utile et fonctionnel des « disparues », sur l’importance de la « transition démographique » qu’amorcent si maladroitement certains pays. Or la violence masculine est la seule cause du génocide et ces rationalisations sont partie intégrante du plan génocidaire. Les donner comme explication ne révèle rien d’autre qu’une complicité « rationnelle » avec les génocidaires.

Le saut éthique est vertigineux pour certains. Car admettre que la seule cause d’une élimination est la « discrimination » – la violence ciblée d’un groupe humain contre un autre – mérite une décision éthique au plan international, et une mesure d’urgence.

Or ce que l’on voit à la place, c’est le silence. Silence éthique sur l’organisation génocidaire de la société : apartheid, pratiques de meurtres ciblés, pratiques de crimes ciblés (viol), persécution (menace et violences punitives), interdits de circuler et d’obtenir seule les moyens de sa survie … Pourquoi ce silence ? Car tout patriarcat est une organisation génocidaire. En reconnaître un seul comme tel, c’est vouer tous les autres à la contestation la plus radicale. Les pays d’Asie montrent le vrai visage du système qui nous a vu naître, l’aboutissement attendu et aussi la réplique inévitable en cas d’insurrection de notre part. Les médias patriarcaux existent pour étouffer ce constat. Ils leur faut donc nier tous les crimes contre l’humanité, perpétrés contre les humains faits « femmes », par lesquels règne la caste virile.

Silence éthique des mots. Les médias et les démographes les versent comme encre noir sur le sang de notre peuple pour le masquer définitivement.

Le viol a presque toujours été défini comme l’atteinte par un homme au droit d’un autre homme. Le génocide sexiste l’est de même. Il ne me semble pas que l’on ait défini le génocide nazi comme « un déséquilibre de la balance du commerce, où les juifs manqueraient au marché des diamantaires… ».

Pourquoi ? Car c’est expliquer le préjudice subi par la communauté humaine de la même manière que pourraient l’expliquer les génocidaires. Ainsi, dire que les victimes juives « manquent à la balance du commerce », c’est reproduire leur stigmate (juif = vénal) et les enterrer dans le ghetto social et idéologique où elles ont péri. C’est mentir sur le préjudice pénal et éthique du crime nazi – il correspondrait à la fonction à laquelle la persécution anti-sémite a assigné-e-s les juives-fs.

De même, personne n’a spécifié les génocides reconnus par le stigmate des victimes : on ne parle ni de « Judicide » ni de « Négricide » ni d' »Arménicide » ! Je refuse que l’on parle de « Féminicide » pour parler de l’élimination de masse et systématisée des femmes.

Le crime contre l’humanité consiste à déshumaniser un humain en le prenant pour un stigmate et le persécuter en conséquence, selon les procédures légitimes, souvent légales, édictées par la société génocidaire. Prendre une personne noire pour « un-e Noir-e » – et donc la traiter en conséquences, selon les normes de la société esclavagiste qui a transformé un phénomène physique en marque distinctive d’infériorité sociale – … prendre une personne juive pour « un-e Juive-f » – et donc la traiter en conséquence, selon les normes de la société anti-sémite qui a transformé une religion en provocation – … tous ces délits de faciès sont la déshumanisation qui caractérise le crime contre l’humanité. « Nègre » et « Jude » sont les stigmates en raison desquels les gens ont été déportés, parqués, utilisés comme outils et finalement éliminés. De même « Femme » n’est pas une tâche de naissance, elle n’implique pas une fonction naturelle de coucherie ou de reproduction. C’est un stigmate socialement plaqué sur nous, et aux conséquences strictement identiques. Le plan qui consiste à nous déporter (nous imposant la plus grande promiscuité avec l’ennemi ou nous bannissant loin d’eux, physiquement et socialement), nous parquer (nous reléguant dans des cachot domestiques ou les bordels de leur guerre totale), nous utiliser (rarement entières, presque toujours par bout utiles : force de travail, cerveau pensant et créatif, cerveau disponible à fonction de paillasson psychique, « corps » à fonctions sexuelle ou reproductive, etc.) et enfin nous éliminer, est un GENOCIDE.

Je dénonce quiconque parle de notre génocide en termes démographiques ou masculinistes. Définir l’atteinte à l’humanité d’un groupe humain ou d’un humain 1) par le préjudice fonctionnel dont se plaint le groupe qui le persécute 2) par le stigmate qui a tué la victime, c’est en soi du négationnisme. C’est perpétuer le crime génocidaire. Cette fois en déniant aux victimes leur humanité jusqu’après leur mort. C’est inscrire sur leur memorial, en guise de liste des crimes et de cause du décès, la rationnalité des bourreaux. C’est inscrire sur leur stèle, en guise de nom, le stigmate que les bourreaux ont inventés pour les éliminer. C’est leur dénier leur statut d’humain même après la mort. C’est continuer le plan génocidaire : nier la nature humaine du cadavre pour effacer la nature du crime. Or ce crime est une atteinte à l’humanité : à l’humanité des victimes, et à l’humanité de tout humain, en tant que l’humanité ne peut être que totalement partagée, sans exclusive.

Nier la gravité éthique du crime, c’est condamner les victimes, mortes ou encore épargnées, à la haine éternelle de leurs bourreaux. Car c’est nous enterrer, mortes et vivantes, comme la tâche humaine que nous sommes pour les oppresseurs.

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Dowry Murders: 106,000 Women Burnt to Death in 1 Year

http://genderbytes.wordpress.com/2011/10/02/video-murder-by-fire-100000-women-a-year/ 

50 million missing, campaign by Rita BANERJI

6 réponses à Crime contre l’humanité ou transition démographique accélérée ?

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  2. Thelx dit :

    Bravo pour cet article, qui malheureusement fait plus que froid dans le dos…

    J’ai une réserve purement formelle : votre volonté d’appeler l’élimination organisée des femmes un « génocide » est étymologiquement incorrecte. Ce mot est formé sur le grec « genos », le peuple ; le génocide (passons sur le mélange malheureux de grec et de latin qui a été fait pour le former, comme d’autres mots absurdement hybrides, type « homosexuel ») est donc l’élimination organisée d’un peuple (défini selon des critères ethniques, physiques, religieux, etc, selon le bon vouloir des génocidaires…). Que l’on reconnaisse n’importe quel génocide comme un crime contre l’humanité n’a rien à voir avec le mot en lui-même, c’est un jugement moral qui a été inscrit dans le marbre de la loi juridique (ce qui est tout à fait justifié, on est d’accord).
    L’élimination des femmes est tout aussi ignoble, mais l’appeler un « génocide » n’est pas correct, dans la mesure où les femmes ne forment pas un peuple et n’en formeront jamais. Vouloir appeler l’élimination des femmes « génocide » est se voiler la face quant au caractère unique et absolument pernicieux de cette violence-ci : elle ne vise pas un soi-disant « ennemi », un « ailleurs » un peu lointain, un « étranger » ; c’est au milieu même d’une culture donnée que cette violence est pratiquée : c’est un meurtre de l’intérieur, on vise la moitié des personnes qui naissent au sein de notre propre groupe ethnique/social/religieux/etc. !
    Il me semble qu’il faut absolument verbaliser cela pour le faire comprendre. Utiliser le mot « génocide » est à la fois incorrect et rend ce fait invisible, ce qui disqualifie un propos pourtant juste. Le néologisme « sexocide » serait plus correct (les anglophones disent « gendercide ») et n’enlève rien à l’horreur de la chose (et permet de souligner que la chose serait tout aussi horrible si c’était le sexe masculin qui était la victime d’une telle élimination, ce que ne permet pas le trop particulier « féminicide », qui serait effectivement tout aussi embarrassant que si on parlait de « judéocide » ou de « négrocide » ou que sais-je…).

    Autre point que je voudrais soulever : l’accusation faite à l’encontre des femmes comme quoi elles seraient elles-mêmes responsables de l’avortement sélectif des foetus féminins. Je pense qu’il serait judicieux, plutôt que d’affirmer d’emblée que cette accusation est injuste et infondée sans autre forme d’analyse, de creuser un petit peu plus le problème.
    Il existe de très nombreuses femmes qui veulent des garçons, pas des filles, surtout pas des filles. Et elles vont effectivement faire ce qu’elles peuvent pour tomber enceintes d’un garçon (régimes spéciaux proposés par les gynéco dans les pays occidentaux…) ou pour se débarrasser d’un foetus féminin ou d’une fille. C’est un fait CONSTATABLE et c’est pourquoi il est maladroit de le nier d’emblée. MAIS ce qu’il faudrait tout de suite souligner, c’est que ce résultat n’est très certainement que le fruit de siècles et de siècles d’idéologie patriarcale qui pèsent sur les consciences des femmes au point de les avoir pénétrées en profondeur. Oui, les femmes se mettent à vouloir des garçons… quand toute la société leur répète que toutes les femmes veulent avoir des petits garçons pour être vraiment épanouies. Oui, les femmes veulent des garçons… quand cela procure des privilèges matériels (pas besoin d’économiser pour une dot) et sociaux (fierté du père qui va pouvoir perpétuer le nom et la lignée, admiration et approbation de la famille, etc.). Oui, les femmes veulent des garçons… quand elles comprennent que ce sera leur seul moyen d’avoir une influence sur le monde extérieur, tandis qu’on essaiera de cantonner leurs filles aux mêmes fonctions limitées qu’elles. Oui, les femmes veulent des garçons… quand des théories pseudo-scientifiques (la psychanalyse, pour ne pas la nommer) leur affirment que « l’envie du pénis » est universelle chez la femme, que ça n’a aucune explication sociale et que la seule raison est le caractère naturellement châtré et inférieur de la femme qui cherche à être compensé. Oui, les femmes veulent des garçons… quand elles veulent le meilleur possible pour leurs enfants, et qu’elles savent pertinemment que le monde sera beaucoup plus hostile et contraignant pour une fille, tandis que le garçon bénéficiera d’un statut privilégié.
    Donc, oui, les femmes elles-mêmes contribuent à leur propre extinction, mais non, elles n’en sont pas coupables. C’est ça le plus choquant : c’est que le patriarcat a réussi, à force de pressions et de dénigrement, à nous convaincre nous-mêmes et à nous enrôler pour le perpétuer activement. Ça fait des siècles et des siècles qu’on nous lave le cerveau pour qu’on en vienne nous-mêmes à penser que nos vies valent moins que celles des hommes, et c’est réussi…

    • binKa dit :

      Merci pour votre réponse détaillée.
      Je refuse totalement ce genre d’analyse, tout ce que j’ai écrit le dément : « oui, les femmes elles-mêmes contribuent à leur propre extinction ». Parler de « contribution » quand les prisonniers suivent les seules règles possibles, c’est carrément négationniste.

      Une réponse à partir de ce que voues écrivez :

      « J’ai une réserve purement formelle : votre volonté d’appeler l’élimination organisée des femmes un « génocide » est étymologiquement incorrecte. Ce mot est formé sur le grec « genos », le peuple ; le génocide {…] est donc l’élimination organisée d’un peuple (défini selon des critères ethniques, physiques, religieux, etc, selon le bon vouloir des génocidaires…). […] L’élimination des femmes est tout aussi ignoble, mais l’appeler un « génocide » n’est pas correct, dans la mesure où les femmes ne forment pas un peuple et n’en formeront jamais.  »

      Comme voues le dites, regrouper des humains en une masse d’interchangeables à éliminer, un « peuple », est l’acte du génocidaire.
      Or les hommes noues traitent comme un « peuple » : persécution, humiliation, crimes ciblés. En parallèle (car l’idéologie suit toujours les conditions matérielles), ils noues désignent aussi comme tel : les traités patriarcaux sur les femmes en développent à envie le caractère Autre, mystérieux … soit noues sommes carrément effacées des dogmes sur l’humanité (c’est le cas de la philosophie occidentale ; on s’en rend compte au détour d’une note en bas de page quand un St Augustin prend la métaphore du phallus pour parler du rapport à Dieu ou qui parle soudain « des femmes » alors qu’il parlait de l’Homme jusqu’à présent) ou bien noues sommes littéralement diffamées sur des kilotonnes de littérature haineuse (la psychanalyse et la sexologie s’en sont fait une spécialité). La reproduction elle-même est vue comme une filiation d’homme à homme (depuis les dogmes religieux jusqu’au droit qui instaure le patronyme), les femmes n’étant pas vues comme une partenaire mais comme un outil (dans les manuels d’éducation à la sexualité en Rance, c’est « le spermatozoïde qui féconde l’ovule » !).

      Les hommes dans leur violence noues traitent comme un « peuple ». Leur crime doit être jugé comme tel. Génocide.

      b.

      • Thelx dit :

        Merci beaucoup pour cette réponse qui éclaire vos idées, mais je dois vous avouer que je ne suis pas convaincue du tout.
        Je vais essayer de mieux expliquer la pensée que je n’ai peut-être pas assez bien exprimée plus haut.

        Tout d’abord, ils ne nous traitent pas comme un peuple, ils nous traitent comme des non-humains. La notion de « peuple » n’a rien à voir avec le fait d’être respecté en tant qu’humain ou non. Le terme de « génocide » indique que l’on traite un peuple comme des non-humains ; le fait que l’on traite les femmes comme des non-humains ne veut pas dire qu’on les traite « comme un peuple ». Un peuple n’est pas fait pour se faire traiter de manière inhumaine.

        Un peuple se définit en fonction d’un nombre de coutumes communes, des traditions que ce peuple s’est choisies (et dans dans le cas du génocide, on diabolise ces coutumes et ces traditions pour diaboliser le groupe et le traiter en non-humain).
        Mais il n’y a pas à proprement parler de culture féminine, de coutumes féminines, de traditions féminines. Les femmes vivent selon les lois que les hommes ont dictées, elles font partie du peuple dans lequel elles sont nées (peuple français, peuple chinois, peuple ougandais…), ces lois sont variables selon les peuples auxquelles elles appartiennent ; le fait que le discours et les lois faits par les hommes soient discriminatoires pour les femmes, le fait que les hommes les traitent comme des inférieures, ne veut pas dire qu’elles appartiennent à un « peuple de femmes » aux règles et coutumes régies par les femmes.

        Le génocide et le « sexocide » sont des phénomènes tout aussi ignobles sur le plan moral, il n’empêche qu’ils le font sur une base essentiellement différente. Et dans cette base essentiellement différente, il y a deux choses :
        – le fait que le sexocide n’ira jamais jusqu’à l’élimination complète et totale de groupe humain visé, sinon ce sont tous les peuples et l’humanité entière qui s’éteindront (et les phallocrates le savent pertinemment et utiliseront toujours cet argument pour faire remarquer que le terme de « génocide » n’est pas pertinent (puisque le génocide vise à l’élimination totale et absolue d’un peuple, ce qui ne compromet pas la survie du reste de l’humanité) DONC (sophisme) le phénomène de l’élimination des femmes n’existerait tout bonnement pas) ;
        – le fait que l’on demande au groupe visé – les femmes – à la fois d’adhérer à l’idéologie discriminatoire comme si elle était une loi naturelle inaliénable et de participer activement à sa perpétuation, en pratiquant et en enseignant la haine d’elles-mêmes. Et ce dernier point très spécifique est d’une violence symbolique et morale absolument inouïe.

        Dire « c’est faux, elles n’y participent pas », c’est un déni de réalité. Dire « c’est vrai, elles y participent MAIS seulement parce qu’on leur a mis dans la tête que c’était naturel, et c’est bien ce qui montre l’impact effroyable de cette manipulation de masse » n’est pas du négationnisme, mais est une analyse qui prend en compte la réalité des faits et révèle l’horreur absolue de cette situation dont l’ampleur n’est pas « que » physique mais a aussi des conséquences absolument atroces sur la psychologie des femmes jusqu’à la faire exploser, la faire se retourner contre elle-même.

        N’avez-vous jamais discuté avec des femmes qui ont essayé de vous convaincre du bien fondé du système patriarcal ? qui se disaient très contentes d’être dans leur situation ? ou qui disaient à d’autres mères qu’elles devaient être déçues d’avoir eu une fille et pas un garçon ? qui affirmaient qu’une femme ne peut être épanouie que lorsqu’elle donne naissance à un fils et ne peut être que déçue de la naissance d’une fille ?
        Moi, si. Beaucoup. Beaucoup trop. Dans la bouche d’une mère de trois fils, fière comme Artaban d’avoir mis des pénis au monde et considérant comme des subordonnées les compagnes de ses fils (en l’occurrence, moi-même, avant que je ne parte, traumatisée par la misogynie de cette famille amplement relayée par la mère). Dans la bouche de jeunes filles de « bonne famille », heureuses d’être le « complément » de leur futur homme à qui elles pourront donner un héritier. Dans la bouche de femmes issues de milieux défavorisés, qui manifestent par là le dégoût qu’elles ont d’elles-mêmes à force d’avoir été victimes de la misogynie des autres. Dans la bouche de ma propre mère, qui n’a eu que des filles, mais qui affirme bravement qu’elle n’en est pas frustrée « parce que quand vous vous marierez, je traiterai vos maris comme mes fils, et donc j’aurais des fils après tout ! »
        Tout ça, ça se passe en France, et quand il y a les mêmes schémas psychologiques dans un pays ou la politique de natalité et où la condition féminine sont plus dures qu’ici, on retrouve « bizarrement » un nombre à peine croyable d’avortements et d’infanticides ciblés sur les foetus et bébés féminins. Tous ne sont pas forcément le produit de la participation active d’un homme : parce que quand les hommes ont réussi à inculquer dans la tête des femmes la haine d’elles-mêmes, ils n’ont plus besoin de toujours intervenir directement pour qu’elles fassent elles-mêmes ce qui leur sied. Et par cette habile manipulation de masse qui dure depuis des siècles et qui est profondément ancrée dans la plupart des cultures du monde, les hommes se déresponsabilisent de la domination et de l’élimination des femmes, accusant d’auto-destruction irrationnelle celles qu’ils manipulent justement pour qu’elles acquièrent ces comportements auto-destructeurs précis.

        Nier cela, c’est faire le lit du véritable négationnisme qui voudrait que cette manipulation n’existât pas.
        Reconnaître la réalité de cette manipulation et ses conséquences inhumaines, ce n’est pas considérer les femmes comme coupables ou complices, c’est reconnaître les mécanismes de l’insoutenable violence psychologique qu’on leur inflige et qui entraîne des comportements schizophrènes et suicidaires qu’elles reproduisent compulsivement de génération en génération.
        Et tant qu’on ne reconnaît pas l’existence de ce mécanisme, il est absolument impossible d’enrayer la machine infernale.

        Ne crois donc pas que j’essaie d’accuser les femmes ni de minimiser ce qu’elles vivent, très loin de là. Je sais juste que j’ai ces mêmes mécanismes en moi-même, injectés dans mon cerveau par l’éducation et la culture dominante, et qu’ils fonctionnaient à plein avant que j’en prenne conscience et que je fasse mon possible pour enfin m’en débarrasser.

        • binKa dit :

          bonjour
          Voues écrivez
          « Tout d’abord, ils ne nous traitent pas comme un peuple, ils nous traitent comme des non-humains. La notion de « peuple » n’a rien à voir avec le fait d’être respecté en tant qu’humain ou non. Le terme de « génocide » indique que l’on traite un peuple comme des non-humains  »

          « Les juifs = peuple » ? « Les juifs » ça existe ?
          « Les Tutsis = peuple » ?
          etc.
          Ces équations sont la version des bourreaux, et les vérités établies par la ségrégation des humains en nations, tribus, etc.
          Cette version n’est pas celle des révolutionnaires, qui veulent abolir les ségrégations, et déraciner jusqu’à la dernière miette les équations génocidaires.
          b.

  3. Coriandre dit :

    http://www.aljazeera.com/indepth/opinion/2013/07/201372814110570679.html
    60 million women – that’s nearly the entire population of the United Kingdom – are missing in India. Why?

    It has been nearly seven months since a young student was gang-raped in the New Delhi, India, and died from her horrific injuries 13 days later on December 29, 2012. The fast-track trial of the accused men has just re-started and the sentence is due any day now.

    When thousands of Indians took to the streets to protest the inability of the establishment to protect women, they demanded not just a change in the law but in people’s attitudes. But the watershed moment that many Indians hoped for doesn’t seem to have arrived. And that may be because most Indians don’t even recognise the extent of the problem in their own country.

    Let’s start with a figure: 60 million. That is nearly the entire population of the United Kingdom. That is also the approximate number of women « missing » in India. They have either been aborted before birth, killed once born, died of neglect because they were girls, or perhaps murdered by their husband’s family for not paying enough dowry at marriage.
    That number isn’t a wild exaggeration or a figure thoughtlessly plucked out of the air, but a matter of demographics. As far back as 1991, the economist Amartya Sen pointed out that Asia was missing 100 million women because of sex-selection and the poor attention paid to women. In 2005, it was estimated at 50 million Indian women in the New York Times. But this isn’t a new problem.

    In 1991, the Indian census showed an unprecedented drop of women in the sex-ratio. After running tests to check whether women had been under-counted, they found that a massive explosion in sex-selection during the 80s had led to a sharp drop in the number of girls being born. A report by Action Aid in 2009 (« Disappearing Daughters » [PDF]) found that in some villages in the state of Punjab, there were as few as 300 girls for every 1,000 boys.

    Overall, India had 37.25 million fewer women than men according to the 2011 Census. To match the sexes equally and then increase the number of women to match the natural sex-ratio would require around 60 to 70 million women. That is the number of women missing. This phenomenon cannot be called anything less than genocide.

    So why isn’t there more recognition of this mass tragedy? In my recently released e-book India Dishonoured: Behind a Nation’s War on Women, I show that many Indians don’t want to recognise the problem because it has become deeply ingrained in the culture.

    This is illustrated with how the political establishment reacted to the gang-rape in New Delhi. Initially, many politicians simply dismissed the protests on the streets. Mohan Bhagwat, chief of the powerful Hindu nationalist organisation Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), even said, « You go to villages and forests of the country and there will be no such incidents of gang-rape or sex crimes. They are prevalent in some urban belts. » He went on to criticise « western lifestyle » in cities for sexual assaults.

    Even the prime minister said nothing about the incident until a week later, despite the protests. Nevertheless an independently produced report commissioned by the government made excellent recommendations that were broadly adopted despite some exceptions. Marital rape, for example, is still legal there.

    While changes in the law are welcome, they barely scratch the surface. India and China alone represent nearly four out of every ten of all people on earth. Due to endemic sex-selection in both countries, the imbalance of women and men there is unprecedented in human history.

    In India, the overall sex-ratio for young children has fallen to 916 girls per 1,000 boys, and had consistently gotten worse over the last 60 years. In 2012, India was named the worst G20 country to be a woman in due to sex selection, infanticide and trafficking.

    Worse, the liberalisation of social attitudes and rising incomes over the last 20 years has, paradoxically, made the matter worse in many ways. While some Indian women have never had so much freedom, these changes are being accompanied by a huge backlash in the form of higher rates of rapes and assaults, and an establishment that has preferred to blame « western values » instead.

    But the problem in India goes to the heart of cultural practices that have been around for centuries. Culture doesn’t just determine a country’s laws and how well they are implemented, it also discourages or encourages violence against women. Practices such as paying dowry for brides, shunning divorced women, passing on inheritances only to men, not putting girls through schools – are all part of the problem. As families get richer, there is more pressure to pay out bigger dowries for girls and they have more money to afford an abortion.

    According to one estimate, by 2020 India will have an extra 28 million men of marriageable age. The social impact of such an imbalance is unprecedented in history, and India barely has a police force and judicial system that can cope with the current problem.

    Unless the country recognises the gravity of the problem and does more to protect half the population, the social impact will be felt in every aspect of Indian society for decades.

    Sunny Hundal is the author of the recently released e-book, India Dishonoured: Behind a Nation’s War on Women and is a regular contributor to the Guardian and the New Statesman

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